PHLEGMONS, SPHACELES, SEPTICEMIES TRAUMATIQUES

En septembre 1912, j’étais appelé auprès d’un nommé L…, âgé de trente-deux ans, atteint d’adéno-phlegmon sous-maxillaire gauche. L’état général était alors assez bon ; la température, qui cependant atteignait 39°, relevait nettement de cette infection locale ; les bruits du cœur étaient bien frappés, et rien dans cet état ne paraissait bien inquiétant. Une large incision faite immédiatement avec toutes les règles d’asepsie donna issue à un pus bien collecté, et dont l’écoulement fut favorisé par le drainage. Pendant les jours suivants, l’état général s’aggrava considérablement, les températures oscillèrent entre 39° et 40°, le pouls monta à 130, les bruits du cœur devinrent sourds et mal frappés, délire, carphologie.

En un mot, je constatai tous les signes d’une infection généralisée grave. L’écoulement du pus s’était arrêté, mais il persistait de l’empâtement de la région sans fluctuation. J’instituai comme traitement général : acétate d’ammoniaque, cannelle, injection de spartéine, huile camphrée, bains tièdes. La dyspnée augmenta de jour en jour, et je constatai, cinq jours après le début de cet accident, une pneumonie gauche très forte. Les phénomènes généraux allant en s’accentuant, j’ajoutai au traitement les injections de Lantol : je fis le premier jour deux ampoules de 3 centimètres cubes, en injections hypodermiques, et je continuai à raison d’une ampoule par jour pendant les jours suivants jusqu’à six ampoules. Dès le second jour, les symptômes inquiétants s’amendèrent, le délire cessa, et la température diminua sensiblement. Le huitième jour du traitement, le malade était hors de danger. En résumé, dans ce cas d’infection généralisée avec symptômes excessivement graves, l’action du Lantol m’a paru incontestable.

Dame X…, ayant eu un accident de voiture, l’avant-pied complètement broyé. Fut conduite à l’hôpital où on dut lui faire une amputation atypique de Lisfranc. Dès le lendemain, une partie du lambeau s’est sphacélé, dans sa partie externe et plantaire. La température s’est élevée et un moment on craint d’être obligé de pratiquer une amputation de la jambe. Je pratique alors des injections sous-cutanées de Lantol à raison de quatre ampoules par jour ( 12 centimètres cubes ) en deux fois. Dès le lendemain, la température commence à redescendre et redevient normale au bout de deux jours. Le sphacèle s’est limité et est resté superficiel, la lymphangite qui l’accompagnait a rétrocédé, et le résultat, qui un moment avait paru très compromis, a été parfait.

Jeune femme de vingt-six ans , qui, après avoir subi une morsure légère de chien au niveau du poignet droit, fut atteinte, vingt-quatre heures après, de lymphangite réticulaire, puis d’adénite de l’aisselle. Température : 39°

Vingt-quatre heures après, l’état local s’est aggravé, la température est de 41° ; au traitement interne par les capsules de Lantol, et en vingt-quatre heures la température tombe à 38° pour redevenir normale bientôt après, pendant que les phénomènes locaux disparaissent.

Cette observation est à rapprocher de celle du Dr G.B…( de Paris ), qui signale « le remarquable effet obtenu dans un cas de phlegmon anthracoide de l’avant-bras qui paraissait prendre une mauvaise tournure et qui a tourné court vingt-quatre heures après l’injection de deux ampoules de Lantol. Il y a là, certainement, autre chose qu’une coïncidence ».

Jeune homme de vingt-cinq ans atteint d’un phlegmon périnéal à la suite d’exercice de cheval, il y a quelques années ; ce phlegmon fut opéré et disparu. L’année suivante, nouveau phlegmon fut opéré et disparut. L’année suivante, nouveau phlegmon opéré de même ; un an après et toujours à la même place, nouveau phlegmon, qui récidive d’abord tous les trois ou quatre mois, puis bientôt à peu près tous les mois. Au bout de trois ou quatre jours, il sortait spontanément un pus caractéristique très fétide et se tarissant peu à peu jusqu’à cicatrisation de la plaie. Ces récidives faisaient craindre à la formation d’une fistule et j’étais résolu à procéder à un large grattage à la première occasion. Quand de nouveau le phlegmon fit son apparition, constatant qu’il était fluctuant, je fis une aspiration de tout le pus, après quoi je remplis la cavité avec la solution de Lantol. Le jour suivant, nouvelle aspiration, et nouvelle injection de Lantol ; deux jours plus tard, troisième aspiration et troisième injection. La guérison survint rapidement, et il ne s’est pas produit de récidive depuis cinq mois.

Salle des hommes, n°88. O. N… Plaie par arme à feu à la jambe gauche il y a seize jours ; température : 38°,38°,5°,39°. Drainages, irrigations, etc… qui ne produisent aucune amélioration, la température est aussi élevée. On fait alors une injection intraveineuse de Lantol. Température 39° ; quatre heures après ; 37,3° ; le lendemain matin, 37°. Cette apyrexie continue jusqu’à la guérison complète.

Dans la même salle, n°97. L. P…, vingt-huit ans, septicémie à la suite d’un traumatisme par revolver à la cuisse droite ; température 38°, puis 39,5°, par la suite de la formation d’un phlegmon. Le foyer est ouvert au thermocautère et largement drainé. Au bout de six jours, la température étant aussi élevée, on pratique une injection intraveineuse de 3 centimètres cubes de Lantol ; le lendemain, 36,5°,37,4°, qui se continue jusqu’à la guérison.